INTERVIEWS
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MICHAEL CRICHTON (producteur et auteur du roman original)
Source
: LIBERATION / Propos recueillis par Edouard Waintrop / 18 août
1999
http://www.liberation.fr/cinema/9908/li-guerrier990818.html
Pour présenter LE 13EME GUERRIER, la production
a fait venir à Barcelone Michael Crichton, auteur de livres à
succès ("Jurassic Park" mais aussi "La
Variété Andromède", "Sphère"...),
un des inventeurs du techno- thriller, et un des romanciers non seulement
le plus populaire au monde (plus de 100 millions de livres vendus sur
la planète), mais le plus adapté au cinéma (JURASSIC
PARK, SOLEIL LEVANT, HARCELEMENT, CONGO, SPHERE, etc.). Ajouter qu'il
est scénariste d'Urgences, le feuilleton TV, et qu'il a lui-même
réalisé sept films, dont certains (COMA, LA GRANDE ATTAQUE
DU TRAIN D'OR, MONDWEST) sont très réussis. Impressionnant
avec ses 2 mètres 05 tout en minceur et sa tête de jeune
homme étonné (il va avoir 57 ans!), cet ancien médecin
curieux de tout (ou presque), ami de l'acteur Sean Connery et du peintre
Jasper Johns, nous a parlé entre autres, du 13EME GUERRIER, en
refusant d'avaliser la thèse pourtant évidente du conflit
avec son metteur en scène...
- Comment avez-vous eu l'idée d'écrire ce
"13ème Guerrier" ?
- Tout est parti d'un pari avec un ami universitaire... Il avait établi
une liste des livres les plus ennuyeux de la littérature anglo-saxonne.
Parmi les premiers titres, il a mis Beowulf [NDLR : poème
classique anglo-saxon de l'époque préchrétienne,
remanié entre le VIIIe et le Xe siècle, c'est la plus ancienne
épopée du monde teutonique, adaptée au cinéma,
il y a peu]. Je n'étais pas d'accord avec lui. Je pense que
Beowulf est un livre très bien fait. Pour approfondir ma
connaissance du sujet, j'ai parié que je ferais moi aussi un livre
d'imagination comme celui-là. Je me suis demandé comment
pouvait démarrer une pareille histoire et je me suis dit qu'il
fallait partir de prémisses véridiques. J'avais entendu
parler de l'écrivain voyageur arabe, Ibn Fahdlan. Je savais qu'il
avait écrit la première chronique de la vie des Vikings.
J'ai appris ensuite que son texte n'existait qu'à l'état
de fragments. J'ai fait presque le tour du monde pour les lire tous. Ils
constituent les trois premiers chapitres de mon livre. Quand le manuscrit
s'arrête, j'ai continué l'histoire à ma façon...
- Quand vous écrivez un livre, pensez-vous à son adaptation
cinématographique ?
- Sauf pour "The Lost World" qui, dès le départ,
se voulait la suite du film JURASSIC PARK de Spielberg, je n'ai jamais
pensé au cinéma en commençant un livre. C'est vrai
que quand j'écris, des images me viennent et ensuite je n'ai plus
qu'à les décrire. A la fin c'est proche du cinéma,
mais je n'y peux rien. Robert Louis Stevenson, un de mes auteurs préférés,
a écrit des livres qui fonctionnent aussi comme des films. A la
fin d'une phrase, on pense souvent à un plan. Et pourtant il vivait
à une époque où le cinéma n'existait pas.
- Vous avez choisi votre metteur en scène, John McTiernan.
- C'est un réalisateur dont j'aime le travail. Je voulais déjà
qu'il dirige SOLEIL LEVANT [NDLR : c'est en définitive Philip
Kaufman qui a été engagé et les conflits avec Crichton
ont été nombreux]. Il est venu me voir. Il m'a parlé
du scénario. Nous avons discuté longtemps. Il a fait écrire
le scénario et il l'a mis en scène. Tout ça, c'était
son désir à lui. Il avait tout le film dans la tête
avec une précision qui m'a ahuri.
- On a parlé de conflit entre vous.
- C'est tout à fait faux.
- Que pensez-vous du choix d'Antonio Banderas?
- Je crois qu'il fait un Arabe crédible. Il a le sens de l'humour
nécessaire pour le rôle. Il est très bien.
- Vous ne réalisez plus de films depuis quinze ans. Pourquoi?
- Je dois être le seul écrivain de Hollywood qui ne veut
pas diriger un film... Ma situation a changé depuis le dernier
film que j'ai dirigé (PHYSICAL EVIDENCE). Cela gênerait les
réalisateurs pour lesquels j'écris si je dirigeais aussi
mes propres longs métrages. Ça rendrait tout plus difficile.
En plus, aujourd'hui, avec les coûts des films, la pression sur
le réalisateur est bien plus grande qu'autrefois. Je ne suis pas
sûr d'avoir envie de vivre ça.
- A l'origine de vos livres, il y a presque toujours un fait de société...
- Je pars d'un problème que je me pose, je fais des recherches
et j'écris le livre pour essayer de le résoudre. Pour "Le
Train d'or de Crimée", je voulais dépasser les
idées reçues sur les voleurs. On volerait seulement parce
qu'on est pauvre et qu'on n'a pas le choix. Il y a pas mal de voleurs
qui ont choisi cette activité parce que c'est plus agréable
que de travailler dans un bureau, on y gagne aussi mieux sa vie et c'est
plus excitant.
- Vous faites souvent dans la provocation : dans "Soleil levant",
vous montriez des industriels japonais prêts à tout pour
dominer le business mondial, dans "Harcèlement",
vous renversiez la logique du harcèlement sexuel...
- Pour "Harcèlement", j'ai d'abord essayé
de construire une histoire. Celle que j'ai racontée s'est vraiment
passée dans une entreprise où une femme, cadre supérieur,
s'est vengée d'un homme qui lui avait refusé ses faveurs.
C'était une bonne histoire, mais j'ai hésité à
la sortir. "Soleil levant" avait fait un tel scandale
et je ne voulais pas qu'on me colle l'étiquette de provocateur
professionnel. J'ai fini par l'écrire parce que mon livre m'intéressait
plus que les conséquences de sa publication.
- Vos projets immédiats?
- Je finis un livre et je travaille aussi à l'adaptation cinématographique
de "Turbulences". Pour l'instant, nous sommes un peu
en panne pour des raisons financières. Le film coûte très
cher.
- Comment expliquez-vous votre succès planétaire?
- Je n'aime pas le style. Mon souhait a toujours été d'écrire
un livre dont personne ne puisse dire qu'il est de moi. Je n'y suis toujours
pas arrivé. Des amis m'ont dit que ma patte était encore
reconnaissable, ou du moins ma façon de penser. C'est peut-être
cela qui marche auprès du public. Je réagis comme tout le
monde face à tel ou tel problème.
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